Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville, et du ministre délégué à la santé, porte-parole du Gouvernement,
Vu la directive 65/65/CEE du Conseil du 26 janvier 1965 concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux médicaments, modifiée notamment par les directives 89/381/CEE et /93/39/CEE ;
Vu le code de la santé publique, notamment ses articles L. 605 (10° et 11°), L. 595-2, L. 670-1 et R. 5144-1 ;
Le Conseil d'Etat (section sociale) entendu,
Décrète :
Art. 1er. - Le chapitre II bis du titre II du livre V du code de la santé publique est complété par une section 2 ainsi rédigée :
"Section 2
"Règles particulières relatives à la pharmacovigilance exercée sur les médicaments dérivés du sang humain
"Paragraphe 1
Correspondants de pharmacovigilance au sein des établissements de santé pour les médicaments dérivés du sang
"Art. R. 5144-23. - Au sein des établissements de santé disposant d'une pharmacie à usage intérieur, le pharmacien gérant cette pharmacie est le correspondant du centre régional de pharmacovigilance pour les médicaments dérivés du sang. Lorsqu'un établissement dispose de plusieurs pharmacies à usage intérieur, le pharmacien gérant chacune de ces pharmacies est le correspondant du centre régional pour les médicaments dérivés du sang qu'il délivre.
"Dans les établissements de santé ne disposant pas d'une pharmacie à usage intérieure, le dépôt de médicaments destinés à des soins urgents mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 5203 ne peut contenir des médicaments dérivés du sang que si l'établissement a désigné un correspondant du centre régional de pharmacovigilance pour les médicaments dérivés du sang. Ce correspondant peut être soit le médecin mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 5203, soit un pharmacien recruté à cet effet et satisfaisant à des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. Son nom est communiqué au centre régional de pharmacovigilance.
"Art. R. 5144-24. - Le correspondant de pharmacovigilance pour les médicaments dérivés du sang mentionné à l'article R. 5144-23 est responsable au sein de l'établissement de la dispensation et du suivi de ces médicaments.
"Dans les établissements publics de santé, il participe dans les conditions prévues à l'article R. 666-12-17 aux travaux du comité de sécurité transfusionnelle et d'hémovigilance.
"Il est responsable de l'enregistrement et de la conservation des informations relatives aux médicaments dérivés du sang, dans les conditions prévues aux articles R. 5144-29, R. 5144-30 et R. 5144-34.
"Il reçoit et transmet au centre régional de pharmacovigilance, conformément à l'article R. 5144-36, les déclarations d'effets indésirables susceptibles d'être dus à un médicament dérivé du sang qu'il a délivré. Toutefois, le centre régional reçoit directement les déclarations relatives aux effets indésirables susceptibles d'être dus à un médicament délivré dans l'établissement au sein duquel ce centre est implanté ; il en transmet copie sans délai à son correspondant dans l'établissement.
"Les correspondants de pharmacovigilance pour les médicaments dérivés du sang sont soumis aux bonnes pratiques de pharmacovigilance prévues à l'article R. 5144-18.
"Paragraphe 2
"Suivi des médicaments dérivés du sang
"Art. 5144-25. - La pharmacovigilance exercée sur les médicaments dérivés du sang comporte un suivi, dit "traçabilité", effectué depuis leur fabrication jusqu'à leur administration aux patients.
"Ce suivi a notamment pour objet de permettre d'identifier rapidement :
"a) Les prélèvements, sanguins à partir desquels a été fabriqué un lot donné de médicaments, ainsi que les lots de médicaments qui ont été fabriqués à partir de prélèvements sanguins donnés ;
"b) Les lots dont proviennent les médicaments administrés à un patient ainsi que les patients auxquels les médicaments d'un lot ont été administrés.
"Le suivi est assuré par l'accomplissement des formalités prévues au présent paragraphe. Lorsqu'il est fait appel à cette fin à des traitements automatisés d'informations, les modes de traitement doivent être approuvés par le ministre chargé de la santé, sans préjudice des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
"Art. R. 5144-26. - I. - Sans préjudice des obligations prévues aux articles R. 5143 à R. 5143-2, le conditionnement d'un médicament dérivé du sang doit comporter trois étiquettes détachables, distinctes de la vignette prévue à l'article L. 625, et indiquant la dénomination du médicament, le nom de l'entreprise ou de l'organisme qui l'exploite et le numéro du lot. Ces étiquettes portent également un code à barres reprenant tout ou partie de ces informations, selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de la santé sur proposition du directeur général de l'Agence du médicament.
"Une des étiquettes détachables est apposée sur le conditionnement extérieur et les deux autres sur le conditionnement primaire. L'autorisation de mise sur le marché ou l'autorisation temporaire d'utilisation peuvent toutefois prévoir une autre répartition, en fonction de la nature et de la destination du produit.
"II. - L'étiquetage des médicaments dérivés du sang doit comporter, outre les mentions prévues à l'article R. 5143, la mention "médicament dérivé du sang humain",
"Art. R. 5144-27. - Tout établissement pharmaceutique assurant la fabrication, l'exploitation, l'importation, l'exportation ou la distribution en gros de médicaments dérivés du sang doit enregistrer, lorsqu'il se dessaisit de ces médicaments :
"a) Le dénomination du médicament concerné ;
"b) Le numéro du lot et le nombre d'unité délivrés
;
"c) La date de l'opération de sortie ;
"d) Le nom et l'adresse du ou des destinataires.
"Les établissements qui fabriquent les médicaments dérivés du sang doivent en outre enregistrer les données permettant d'identifier les prélèvements sanguins utilisés pour la fabrication de chaque lot de médicaments.
"Art. R. 5144-28. - Les pharmaciens d'officine qui délivrent un médicament dérivé du sang doivent aussitôt transcrire sur un registre spécial coté et paraphe par le maire ou par le commissaire de police, ou enregistrer immédiatement, par tout système approuvé par le ministre chargé de la santé, les informations mentionnées à l'article R. 5198, la date de naissance du patient ainsi que les informations figurant sur l'étiquette détachable du conditionnement extérieur. En cas de transcription sur un registre, cette étiquette y est apposée.
"Les transcriptions ou enregistrements comportent pour chaque médicament délivré un numéro d'ordre différent.
"Art. R. 5144-29. - I. - Dans les établissements de santé et les autres établissements disposant d'une pharmacie à usage intérieur, les médicaments dérivés du sang sont délivrés par la pharmacie à usage intérieur au vu d'une prescription médicale nominative.
"La pharmacie à usage intérieur joint au médicament un bordereau numéroté, dénommé bordereau de délivrance et d'administration, sur lequel elle porte les informations suivantes :
"a) Le nom du prescripteur et le service auquel il appartient ;
"b) Les nom, prénoms et date de naissance du patient auquel
le médicament est destiné ;
"c) Les informations figurant sur l'étiquette détachable
du conditionnement extérieur ;
"d) La date de délivrance ;
"e) Les quantités délivrée.
"En cas d'enregistrement manuscrit, l'étiquette détachable du conditionnement extérieur est apposée sur le bordereau. Une copie du bordereau est conservée par la pharmacie à usage intérieur jusqu'au retour de l'original.
"II. - La personne qui administre le médicament au patient complète le bordereau en y portant les informations suivantes :
"a) Les nom, prénoms et date de naissance de patient ;
"b) La date d'administration ;
"c) La dose administrée.
"Elle mentionne la dose administrée et la date de cette administration sur l'ordonnance conservée dans le dossier médical et elle y appose une étiquette détachable du conditionnement primaire. Elle appose sur le bordereau l'autre étiquette détachable du conditionnement primaire.
"Le bordereau complété est immédiatement retourné à la pharmacie à usage intérieur.
"S'il n'est pas utilisé, le médicament est retourné à la pharmacie à usage intérieur accompagné du bordereau.
"III. - Lorsque la pharmacie à usage intérieur délivre directement un médicament dérivé du sang à un patient, les informations mentionnées au I du présent article sont transcrites sur un registre spécial coté ou paraphe par le maire ou le commissaire de police, ou enregistrées par tout système approuvé par le ministre chargé de la santé.
"IV. - A titre exceptionnel, et sur décision du directeur de l'établissement de santé prise après avis du pharmacien gérant, des services peuvent disposer d'une dotation de médicaments dérivés du sang destinés à des soins urgents. Cette dotation est gérée dans le respect des dispositions de l'arrêté prévu au dernier alinéa de l'article R. 5203.
"Lorsqu'un médicament est prélevé sur la dotation prévue au précédent alinéa, la personne qui l'administre au patient porte sur le bordereau de délivrance et d'administration l'ensemble des informations mentionnées aux I Et II du présent article et satisfait aux autres prescriptions du II. Le bordereau est ensuite transmis à la pharmacie à usage intérieur.
"Art. R. 5144-30. - Dans les établissements de santé ne disposant pas d'une pharmacie à usage intérieur qui détiennent des médicaments dérivés du sang dans les conditions mentionnées à l'article R. 5203, l'approvisionnement en médicaments dérivés du sang donne lieu à l'enregistrement par le correspondant mentionné à l'article R. 5144-23, sur un registre spécial coté et paraphe par le maire ou par le commissaire de police, ou par tout système approuvé par le ministre chargé de la santé, de la dénomination des médicaments, du nom de l'organisme ou de l'entreprise qui les exploite, des quantités reçues et des numéros des lots.
"La délivrance et l'administration des médicaments s'effectuent dans les conditions prévues aux I et II de l'article R. 5144-29. Elles donnent notamment lieu à l'établissement de bordereaux de délivrance et d'administration.
"Art. R. 5144-31. - Dans les établissements de transfusion sanguine et dans tout organisme, autre que les officines de pharmacie et les établissements de santé, habilité à dispenser des médicaments dérivés du sang, ces médicaments sont délivrés au vu d'une prescription médicale nominative.
"La délivrance des médicaments donne lieu à l'enregistrement des informations mentionnées au I de l'article R. 5144-29 sur un registre spécial coté et paraphé par le maire ou le commissaire de police, ou par tout autre système approuvé par le ministre chargé de la santé.
"Après administration, une étiquette détachable du conditionnement primaire est apposée sur l'ordonnance figurant dans le dossier médical du patient et une autre étiquette est apposée sur le registre.
"Art. R. 5144-32. - Lorsqu'un membre d'une profession de santé administre un médicament dérivé du sang hors des établissements de santé ou des établissements et organismes mentionnés à l'article R. 5144-31, il appose une étiquette détachable du conditionnement primaire de l'unité administrée sur l'original de l'ordonnance conservée par le patient. Lorsque le médicament est administré par un médecin, celui-ci appose l'autre étiquette détachable du conditionnement primaire de l'unité administrée dans le dossier médical, s'il existe.
"Art. R. 5144-33. - Les formalités de transcription, d'enregistrement et d'établissement de bordereaux prévues au présent paragraphe tiennent lieu des transcriptions et enregistrements mentionnés à l'article R. 5198.
"Art. R. 5144-34. - Les registres ou enregistrements prévus aux articles R. 5144-27 à R. 5144-32 sont conservés pendant une durée de quarante ans. Lorsque cela est nécessaire à l'exercice de la pharmacovigilance, les centres régionaux de pharmacovigilance ont accès à ces documents.
"Paragraphe 3
"Obligations de signalement
"Art. R. 5144-35. - Lorsqu'une personne habilitée à prescrire, dispenser ou administrer des médicaments constate un effet indésirable susceptible d'être dû à un médicament dérivé du sang, elle doit en faire la déclaration immédiate, même si elle n'a pas personnellement prescrit, dispensé ou administré le médicament en cause. La déclaration doit être adressée :
"a) Lorsque le médicament a été délivré dans un établissement de santé, au centre régional de pharmacovigilance, s'il est implanté au sein de cet établissement, et au correspondant mentionné à l'article R. 5144-23 dans les autres cas ;
"b) Lorsque le médicament n'a pas été délivré dans un établissement de santé, au centre régional de pharmacovigilance.
"La déclaration est faite selon les modalités fixées par l'arrêté mentionné à l'article R. 5144-21.
"Art. R. 5144-36. - Le correspondant mentionné à l'article R. 5144-23 ayant reçu la déclaration prévue à l'article R. 5144-35 doit la transmettre immédiatement au centre régional de pharmacovigilance. S'il a autrement connaissance d'un effet indésirable susceptible d'être dû a un médicament dérivé du sang, il doit lui-même en faire la déclaration immédiate au centre régional.
"Lorsque des effets indésirables sont susceptibles d'être dus à l'administration de médicaments dérivés du sang à un patient auquel ont également été administrés des produits sanguins labiles, le correspondant de pharmacovigilance communique une copie de la déclaration au correspondant d'hémovigilance de l'établissement de santé dans lequel ces produits ont été administrés. Le correspondant d'hémovigilance informe aussitôt le coordonnateur régional d'hémovigilance.
"Art. R. 5144-37. - Les centres régionaux de pharmacovigilance informent le jour même l'Agence du médicament des déclarations d'effets indésirables susceptibles d'être dus à un médicament dérivé du sang qu'ils ont reçues.
"Art. R. 5144-38. - Les organismes ou entreprises exploitant des médicaments dérivés du sang qui ont connaissance d'effets indésirable susceptibles d'être dus à ces médicaments en informent le directeur général de l'Agence du médicament dans les conditions prévues à l'article R. 5144-20.
"Art. R. 5144-39. - Les établissements de transfusion sanguine et les organismes ou entreprises fabriquant ou exploitant des médicaments dérivés du sang qui ont connaissance d'une information de nature à faire peser un doute sur la qualité de sang ou de plasma destiné au fractionnement s'en informent mutuellement. Les établissements de transfusion sanguine informent l'Agence française du sang. Les organismes ou entreprises fabriquant ou exploitant les médicaments informent l'Agence du médicament.
"L'agence du médicament et l'Agence française du sang se communiquent mutuellement toute information relative à la qualité du plasma destiné au fractionnement. Elles s'informent également de tout incident susceptible d'être lié à l'administration soit d'un médicament dérivé du sang, soit d'un produit labile issu d'un don de sang dont le plasma a été destiné au fractionnement."
Art. 2. - Le b du troisième alinéa de l'article R. 5139 du code de la santé publique est remplacé par les dispositions suivantes :
"b) Lorsque l'étiquetage ou la notice du médicament ou du produit ne sont pas conformes aux prescriptions générales ou spécifiques prévues au livre V."
Art. 3. - Le second alinéa de l'article R. 666-12-17 du code de la santé publique est remplacé par les dispositions suivantes :
"Le coordonnateur régional de l'hémovigilance, le responsable du centre régional de pharmacovigilance et le correspondant au sein de l'établissement du centre régional de pharmacovigilance pour les médicaments dérivés du sang, s'ils le souhaitent, assistent de droit aux séances du comité et peuvent y être entendus."
Art. 4. - L'article R. 666-12-24 du code de la santé publique est complété par un troisième alinéa ainsi rédigé :
"Si des effets indésirables susceptibles d'être dus à un produit sanguin labile sont apparus chez un patient auquel ont également été administrés des médicaments dérivés du sang, une copie de la fiche d'incident transfusionnel est communiquée au correspondant de pharmacovigilance pour les médicaments dérivés du sang de l'établissement de santé dans lequel ces médicaments ont été administrés."
Art. 5. - Les dispositions du présent décret entrent en vigueur le premier jour du septième mois suivant celui de sa publication.
Art. 6. - Le ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville, et le ministre délégué à la santé, porte-parole du Gouvernement, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le6 mai 1995.