Dans la presse…
Pierre MONCHARMONT
L’utilisation de méthodes non invasives a représenté un progrès significatif
dans le diagnostic de la maladie hémolytique Rhésus (RH1) chez le fœtus. Une équipe belge vient de rapporter une expérience de quatre ans dans le domaine de la détermination du génotype RHD à partir de l’ADN fœtal présent dans le plasma maternel (Minon et al. Routine fetal RHD genotyping with maternal plasma : a four-year experience in Belgium. Tranfusion 2008; 48 :373-381). De novembre 2002 à décembre 2006, les auteurs ont évalués le génotypage fœtal sur le plasma de 563 femmes enceintes. Dix huit grossesses étaient gemmellaires. L’essentiel des indications correspondait à la prise en charge de patientes allo-immunisées anti-RH1 ou à risque d’allo-immunisation. La détermination du génotype fœtal a été réalisée en technique de PCR en temps réel en amplifiant 3 exons du gène RHD, les numéros 4, 5 et 10. Pour améliorer la sensibilité, la PCR était réalisée en double sur chaque exon. De plus, la confirmation de l’amplification et la présence d’un fœtus mâle ont été vérifiées par l’amplification du gène du récepteur de chemokine universel (CCR5) et de la séquence du gène SRY lié au chromosome Y. Les auteurs ont établi des critères d’interprétation. Un fœtus était considéré comme RHD+ si au moins une réaction positive (sur un ou les deux essais) était obtenue sur chacun des 3 exons testés. La difficulté due au pseudogène RHDY ou gène hybride RHD-CE-D était contournée en considérant qu’un fœtus était négatif si aucune amplification n’était constatée sur les exons 4 et 5, quelque soit le résultat de l’amplification sur l’exon 10. Les résultats obtenus chez le fœtus ont été comparés avec le résultat du groupage RH1 réalisé chez l’enfant à la naissance. Sur 545 grossesses monozygotes, 90 fœtus ont été trouvés RHD-/SRY-, 95 RHD-/SRY+, 176 RHD+/SRY- et 184 RHD+/SRY+. A la naissance, 544 sur 545 résultats ont été confirmés. Aucun résultat faux négatif n’a été observé. Un résultat faux positif a été noté chez une patiente de 37 ans ayant bénéficié d’une transplantation rénale d’un donneur mâle RH1 et enceinte. Sur le plasma maternel, le fœtus était RH1 et de sexe mâle. Sur le prélèvement d’amniocentèse, le fœtus était RHD- et SRY-. La patiente a donné naissance à une fille RH-1.Trois autres discordances ont été observées entre le génotypage fœtal et le groupage sur sang du cordon, avec un fœtus RHD+ et un groupage RH-1 sur sang du cordon. Dans ces trois cas, un contrôle sur sang veineux du nouveau-né (2 cas) et sur prélèvement buccal (1 cas) ont confirmé le résultat obtenu lors de génotypage. Enfin, aucune discordance du point de vue du sexe n’a été relevée. La sensibilité de la PCR en temps réel est pour les exons 4,5 et 10 de 86,8, 97,1 et 96,9 % et pour le gène SRY de 94,9%. L’absence d’amplification n’est pas liée à l’âge gestationnel. Dix patientes avec une amplification de l’exon 10 ont donné naissance à un enfant RH-1. Dans les 10 cas, la patiente ou son conjoint étaient des noirs d’origine africaine. Quatre patientes et 3 conjoints étaient porteur du pseudogène RHDY et la présence du gène hybride RHD-CE-D a été évoquée chez 2 patientes et un conjoint. Aucun résultat faux négatif n’a été observé chez les patientes avec grossesse gemmellaire.
Dans la discussion, les auteurs insistent sur la nécessité de réaliser plusieurs tests sur chaque échantillon maternel, sur la présence de gène RHD silencieux ou inactif dans les populations africaines et asiatiques et sur le cas des RH partiels. Enfin, cette recherche permet d’éviter l’injection d’immunoglobulines chez des patients RH-1 porteuses d’un fœtus RH-1.
Sur le même sujet, une équipe britannique vient de montrer que le typage RHD sur l’ADN fœtal dans le plasma maternel était réalisable avec une technologie haut débit (Finning et al. Effect of high throughput RHD typing of fetal DNA in maternal plasma on use of anti-RhD immunoglobulin in RhD negative pregnant women: prospective feasibility study. British Medical Journal 2008 ;336 :816-818). Sur 1869 échantillons, seuls trois faux négatif (0,2 %, ADN fœtal RhD négatif / phénotype sur sang de cordon RhD positif) ont été observés. L’introduction de ce génotypage réduit considérablement les administrations inutiles d’immunoglobulines anti-RhD chez les mères RhD négatif.
Les techniques d’inactivation des pathogènes dans les produits sanguins labiles constituent depuis plusieurs années un progrès significatif dans la lutte contre les maladies infectieuses transmissibles par transfusion. Le dépistage des donneurs à risque pour la maladie des Chagas a été introduit en France au cours de l’année 2007 en qualification biologique du don. Une équipe américaine vient d’évaluer l’inactivation sur des suspensions d’hématies de l’agent de cette maladie, le Trypanosoma cruzi (Wagner et al. Photoinactivation of Trypanosoma cruzi in red cell suspensions with thiopyrylium. Transfusion and Apheresis Science. 2007 ;37 :23-25). Les auteurs ont inoculé Trypanosoma cruzi au stade trypomastigote dans des suspensions érythrocytaires et traité ces suspensions contenant du thiopyrylium à deux concentrations différentes, 3,1 et 6,3 mM, par la lumière (longueur d’onde dans le rouge à 670 nm) à raison de 1,1 J/cm2. Le thiopyrylium est un nouvel agent intercalant de l’ADN, photosensible. Un titrage de parasite a été réalisé en triplicate par dilutions en série des échantillons tests et contrôles et mise en culture. Avec le traitement comportant une dose de 6,3 mM de thiopyrylium, aucune prolifération des parasites n’a été observée. Les auteurs comparent cette dose avec celle nécessaire pour inactiver Leishmania donovani infantum stade amastigote qui est de 12 mM. Ils expliquent cette différence par le fait que l’accès de Trypanosoma cruzi serait plus facile que pour Leishmania donovani infantum, en raison d’une situation extracellulaire versus intracellulaire.
Le suivi de l’évolution de la répartition des donneurs selon leur âge représente un enjeu très important pour assurer dans un futur plus ou moins proche une adéquation entre dons et produits sanguins nécessaires à la satisfaction des besoins des receveurs. Une étude américaine vient de confirmer le vieillissement des donneurs de sang (Zou et al. Changing age distribution of the blood donor population in the United States. Transfusion, 2008 ;48 :251-257). En utilisant les données collectées depuis 1995 chez les donneurs de sang de la Croix Rouge américaine, les auteurs ont suivi l’évolution et la répartition par âge des donneurs premier don et des donneurs réguliers de 1996 à 2005, par période de trois ans. Parmi les donneurs réguliers, la proportion d’unités prélevées chez les donneurs âgés de 50 ans ou plus est ainsi passée de 22,1% en 1996 à 34,5% en 2005 avec parallèlement une augmentation de la proportion de cette catégorie de donneurs. Au niveau des tranches d’âge inférieure à 49 ans, l’évolution se révèle défavorable. Ainsi, une décroissance de plus de 10% est constatée chez les donneurs réguliers, aussi bien chez les femmes que chez les hommes pour la tranche d’âge 20-49 ans. Une décroissance du même ordre est observée chez les hommes âgés de 25 à 49 ans premier don. Un taux de diminution supérieur à 40% est noté chez les donneurs et donneuses réguliers de 25 à 39 ans. Les auteurs ont observé un décalage du pic d’âge des donneurs. Ainsi, en 1996, la tranche d’âge 30-39 ans était la plus élevée contre 50 à 59 ans et plus de 60 ans en 2005. Signe peut être encourageant, une augmentation est observée dans la tranche d’âge des 16-19 ans premier don, mais, semble-t-il, sans une bascule vers le don régulier.
Un effort significatif de recrutement et surtout de fidélisation des donneurs sera à entreprendre pour assurer une couverture adéquate des besoins en produits sanguins. Au cas où ces objectifs ne seraient pas atteints, un risque de pénurie apparaît, risque qui ne pourrait être pallier que par une réduction de l’usage de la transfusion.
Pierre MONCHARMONT