Date d'application : pour diffusion immédiate
NOR : MESP0130089C (non paru au journal
officiel)
Grille de classement : SP 4 435 Renvoi
à SP3 323
Résumé : La présente circulaire a pour objet d'actualiser les recommandations visant à réduire les risques de transmission d’agents transmissibles non conventionnels de la circulaire DGS/DH n° 100 du 11 décembre 1995. |
Mots-clés : Maladie de Creutzfeldt-Jakob, nouveau variant, encéphalopathie subaiguë spongiforme transmissible, infection nosocomiale, agents transmissibles non conventionnels et conventionnels, désinfection, stérilisation, inactivation, dispositifs médicaux |
Textes de référence : Décret n° 96-838 et arrêté du 19 septembre 1996 relatifs à la déclaration obligatoire des suspicions de maladie de Creutzfeldt-Jakob et autres encéphalopathies subaiguës spongiformes transmissibles humaines ; circulaire DGS/DH n° 51 du 29 décembre 1994 relative à l'utilisation des dispositifs médicaux à usage unique ; lettre circulaire DH n° 987262 du 15 juillet 1998 relative à la sécurité d'utilisation des dispositifs médicaux ; guide de bonnes pratiques de désinfection des dispositifs médicaux, Conseil supérieur d'hygiène publique de France, Comité technique des infections nosocomiales, 1998 ; circulaire DGS/DPPR n° 2000/292 du 29 mai 2000 relative à diverses mesures concernant les appareils de désinfection des déchets d'activités de soins à risques infectieux et assimilés. |
Textes abrogés ou modifiés : Circulaire DGS/DH n° 100 du 11 décembre 1995 relative aux précautions à observer en milieu chirurgical et anatomopathologique face aux risques de transmission de la maladie de Creutzfeldt-Jakob ; circulaire DGS/DH n° 236 du 2 avril 1996 relative aux modalités de désinfection des endoscopes dans les lieux de soins. |
Annexes :
Annexe 1 : 8 fiches Annexe 2 :Choix de la procédure d’inactivation des ATNC pour les dispositifs médicaux recyclables |
Les encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles (ESST) sont des maladies dégénératives du système nerveux central, transmissibles et caractérisées par l’accumulation d’une isoforme pathologique (PrPSc) d’une protéine normale, la PrPC (cf. circulaire DGS/DH n° 100 du 11 décembre 1995). Il n’existe pas aujourd’hui de test de dépistage chez l'homme ni de traitement de ces maladies qui sont constamment fatales. Une démarche générale de prévention est donc essentielle.
La décennie 1980 a été marquée par l’apparition et le développement des formes iatrogènes de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ). Depuis 1994 (Date d'apparition des symptômes chez les premiers cas connus. La première publication remonte à 1996), on assiste à l'émergence d'une nouvelle forme de MCJ, identifiée sous le nom de nouveau variant (nvMCJ) résultant, selon toute vraisemblance, de la transmission à l'homme de l'agent de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB). Au 1er décembre 2000, 87 patients ont été reconnus atteints en Grande-Bretagne, 1 en Irlande et 3 en France. Compte tenu de la longue durée d’incubation, les données épidémiologiques disponibles sur les cas de nvMCJ sont trop parcellaires pour estimer la prévalence de l’infection humaine. Les projections publiées en août 2000 font état d’un nombre total de cas qui pourrait être compris entre 63 et 136.000 cas pour la seule Grande-Bretagne. Pour la France, du seul fait de l’importation de produits alimentaires d’origine bovine, certains experts estiment que l’exposition de la population française à l’épizootie britannique se situe autour de 5 % de celle de la population britannique (Analyse du risque de transmission de la nouvelle variante de la MCJ par le sang et ses dérivés. Rapport du groupe d’experts de l’AFSSAPS, 11 décembre 2000). En outre, malgré l’ampleur bien moindre de l’épizootie dans notre pays et les nombreuses mesures prises pour réduire le risque d'exposition de la population à l'agent de l'ESB par l’alimentation, des bovins élevés et abattus en France, infectés par l'ESB, ont pu entrer dans la chaîne alimentaire.
Depuis plusieurs années, différentes mesures de prévention ont été prises afin de réduire au niveau le plus faible possible, le risque de transmission des divers agents infectieux lors des soins, particulièrement dans les établissements de santé : des mesures d’ordre réglementaire, mais aussi des recommandations, notamment sous forme de guides de bonnes pratiques, élaborées sous l’égide soit du ministère chargé de la santé, soit de sociétés savantes. La circulaire DGS/DH n° 100 du 11 décembre 1995, en particulier, indique les précautions à observer en milieu chirurgical et anatomo-pathologique face aux risques de transmission de la MCJ.
Il est désormais nécessaire de prendre en compte le risque lié au nouveau variant qui présente des caractéristiques préoccupantes. En effet, dans les formes classiques d’ESST humaines, on estime que le titre infectieux présent dans les tissus périphériques est très faible, l'infectiosité étant principalement contenue dans le système nerveux central et l'œil (La plupart des études d’infectiosité ont été faites à partir d’inoculations chez l’animal. Il existe une excellente corrélation entre le taux de PrPSc évalué par immunodétection et le titre infectieux obtenu par inoculation à l'animal.). Dans le cas du nvMCJ, la répartition tissulaire de l'infectiosité pourrait être plus large, puisque la présence de la protéine pathologique (PrPSc) dans les amygdales et l'appendice des patients atteints suggère la présence de l'infectiosité dans l'ensemble des tissus lymphoïdes, y compris pendant la phase préclinique (Ainsi, chez deux malades britanniques atteints de nvMCJ, la présence de PrPSc a été détectée dans l’appendice prélevé respectivement 8 mois et 3 ans avant les premiers signes cliniques de nvMCJ).
Plusieurs éléments nouveaux
sont intervenus depuis 1995 : l’apparition du nvMCJ a conduit à
renforcer le dispositif de surveillance par la mise en place, en 1996,
de la déclaration obligatoire des ESST humaines diagnostiquées
ou suspectées ; les pratiques de thanatopraxie, déconseillées
par la circulaire DGS/DH n° 100 du 11 décembre 1995, en cas
de décès d’un malade suspect d’être atteint d’une ESST,
ont été interdites par l'arrêté du 20 juillet
1998 (Cet arrêté, partiellement annulé
par le conseil d'Etat le 29 novembre 1999, est en cours de réécriture)
; la circulaire DGS/DH n° 100 du 11 décembre 1995 a été
complétée par la circulaire DGS/DPPR n° 292 du 29 mai
2000 relative à l'élimination des déchets d'activité
de soins. Surtout, de nouvelles recommandations pour le contrôle
du risque de transmission interhumaine des ESST ont été émises
par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en septembre 2000
à la suite d'une consultation organisée en mars 1999. Celles-ci
tiennent compte des diverses études expérimentales qui mettent
en évidence la résistance exceptionnelle des agents transmissibles
non conventionnels (ATNC) aux procédés physiques et chimiques
d’inactivation (L'efficacité des procédés
d’inactivation a été validée sur des échantillons
complexes de matière infectieuse et non sur des dispositifs médicaux
en situation réelle d’utilisation)
, ainsi que les paramètres susceptibles de l’expliquer (en
particulier, la dessiccation). L'OMS rappelle, par ailleurs, que seule
la destruction par incinération est susceptible de garantir l'élimination
complète de l'infectiosité, ce qui conduit cet organisme
à préconiser l’incinération pour un dispositif contaminé
par un tissu de haute infectiosité.
La présente circulaire a été élaborée après consultation du Comité interministériel sur les ESST (CIESST), du Conseil supérieur d'hygiène publique de France (CSHPF) et du Comité technique national des infections nosocomiales (CTIN). Elle complète et remplace la circulaire DGS/DH n° 100 du 11 décembre 1995, à l'exception du chapitre 6 relatif aux situations particulières dont les dispositions, concernant les accidents professionnels et l'anatomopathologie, restent applicables (pour cette dernière et les laboratoires de biologie, une actualisation des recommandations paraîtra ultérieurement). Elle tient compte des difficultés d'application signalées depuis la parution de la circulaire DGS/DH n° 100 du 11 décembre 1995. Elle modifie également la circulaire n° 236 en ce qui concerne le traitement préliminaire ainsi que le produit désinfectant de référence pour les endoscopes utilisés dans un acte à risque comportant un contact avec les formations lymphoïdes. Elle comporte 8 fiches techniques qui actualisent les principes de gestion visant à réduire le risque de transmission des agents non conventionnels lors des actes nécessitant des dispositifs médicaux recyclables stérilisés ou désinfectés. Elle demande la mise en œuvre du plus haut niveau de précaution compatible avec le dispositif médical utilisé, en fonction des caractéristiques du patient, de l'acte et du tissu concerné. Ainsi, elle préconise l'usage unique pour tout matériel en contact avec les tissus à risque, dès lors que la qualité et la sécurité des soins sont assurées. Lorsque le recours à du matériel à usage unique n'est pas possible, elle recommande, en tenant compte de la nature de l'acte, du tissu concerné et du niveau de risque du patient, de traiter le matériel par le procédé d'inactivation des ATNC le plus efficace qu'il puisse supporter. Ces recommandations seront réévaluées et adaptées en fonction de l'évolution des connaissances scientifiques.
Il convient que les professionnels engagent dès à présent un processus d’adaptation des procédures et du matériel spécifiques à chaque domaine d'exercice, conformément aux principes énoncés dans les fiches techniques de la circulaire. Il leur est demandé d'établir des protocoles écrits mettant en application ces principes (ou de les réviser) en tenant compte de l'évolution des dispositifs et des produits dont ils disposent.
Ils pourront s’appuyer sur les recommandations spécifiques à certaines pratiques, à certains secteurs ou à certaines procédures, produites par les centres de coordination de la lutte contre les infections nosocomiales et le CTIN en liaison avec les sociétés savantes. Les protocoles seront établis et le choix du matériel effectué en relation avec le comité de lutte contre les infections nosocomiales, l’équipe opérationnelle d’hygiène et le pharmacien qui veilleront, notamment, avec le responsable de l’établissement, à ce que les conditions de mise en œuvre de cette circulaire soient réunies. Ce dernier veillera en particulier à la coordination des professionnels concernés et à la bonne information des personnels chargés de la désinfection et de la stérilisation des dispositifs médicaux. Des procédures de contrôle interne de l'application des protocoles devront être définies et mises en œuvre. Par ailleurs, la mutualisation des ressources au sein d’un même établissement, ainsi que la coopération entre établissements, devront également être favorisées.
Si l’émergence de ce nouveau risque conduit à rappeler aux professionnels de santé qu'il est impératif de respecter strictement les indications des actes invasifs (que ce soit à visée thérapeutique, diagnostique ou préventive), il ne saurait justifier le refus de soins ou d'explorations qui seraient nécessaires aux patients.
L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) procède à un bilan des dispositifs médicaux existants au regard des principes de réduction du risque de transmission des ATNC énoncés dans cette circulaire, notamment des produits désinfectants et des stérilisateurs. Elle pourra, le cas échéant, inciter les fabricants au développement de produits conformes à ces principes et elle pourra également être amenée à interdire certains dispositifs médicaux réutilisables.
Nous sommes conscients des conséquences que ces nouvelles recommandations vont entraîner à terme, non seulement dans le fonctionnement des établissements, mais aussi dans la vie quotidienne des professionnels. La mise en application de ces recommandations ne pourra se faire que progressivement selon un programme tenant compte des priorités identifiées dans chaque établissement ainsi que de l'inventaire des dispositifs disponibles et de leurs caractéristiques. Ce programme sera régulièrement réévalué en fonction, notamment, de l'évolution du matériel et des produits. Un plan pluriannuel d'accompagnement financier est mis en œuvre dès cette année. Les taux d'évolution de l'ONDAM ont été définis en tenant compte des conséquences qui découlent de ces recommandations. Pour les établissements de santé financés par dotation globale, le détail des mesures d'accompagnement figure dans la circulaire DHOS/DGS/DSS n° 603 du 13 décembre 2000 relative à la campagne budgétaire pour 2001. Pour les établissements privés sous OQN, des indications seront données aux agences régionales de l'hospitalisation en vue de tenir compte de l'application de ces mesures dans la fixation des tarifs des établissements de santé et pour l'emploi du fonds de modernisation des cliniques. Les directeurs des agences régionales de l'hospitalisation ont reçu l'instruction de procéder à l'examen de la situation propre à chaque établissement afin d'allouer les moyens nécessaires selon le calendrier le plus adapté.
Vous voudrez bien diffuser cette circulaire
aux établissements de santé publics et privés de votre
département. Vous voudrez bien également demander aux directeurs
des établissements de santé de la transmettre aux présidents
des commissions médicales d'établissements, aux présidents
des comités de lutte contre les infections nosocomiales, aux équipes
opérationnelles d'hygiène, aux services pharmaceutiques,
ainsi qu'à tous les services et professionnels concernés.
La
Ministre de l'emploi et de la solidarité
Elisabeth GUIGOU |
Bernard KOUCHNER |